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Temps et modes de travail

Vous pouvez retrouver nos travaux précédents sur cette thématique ici.

EXPRIMEZ-VOUS ! Vos témoignages comptent!

Témoignage après 2 ans de pratique sur les actuelles méthodes d’organisations et de conditions de travail 

Le témoignage ci-après est emblématique de la situation vécue par les collègues en open spaces et hot desking et ce d’autant plus qu’il s’agit d’un bâtiment neuf conçu pour correspondre aux nouveaux espaces de travail ainsi qu’à la nouvelle organisation de travail. Nous appelons les collègues à nous faire parvenir d’autres témoignages que nous publierons. Nous pensons aussi qu’un bilan de doit être tiré pour l’ensemble des services et discuté au sein du comité du personnel et entre syndicats et l’administration.

Le déménagement des différents sites de la CNECT à Beaulieu a eu lieu au début de l’été 2022. Il s’agissait plutôt d’un emménagement car nous n’avons pas pu garder avec nous nos documents papiers, classeurs etc. mais surtout tous les petits accessoires de bureau que nous avions auparavant pour personnaliser notre environnement de travail personnel (machines à café, plantes vertes, cadres-photos etc.) et qui rendaient la vie plus agréable.

  • En effet le L-51 fonctionne en Open Space et Hot Desking, et seuls les Directeurs ont leur propre cellule de bureau et les Chefs d’unité leur espace réservé dans l’open space.
  • Le L-51 est prévu pour héberger 53-54% du staff CNECT (j’ai retrouvé l’information), ratio desk/total staff. Dans les faits, il y a aussi beaucoup de personnel externe qui travaille au L-51 et j’ignore s’ils sont comptés dans le ratio.
  • Le bâtiment en lui-même est très moderne, ce qui est une véritable amélioration par rapport au vieux immeubles BU29-31-33 (ascenseurs et sanitaires vétustes, humidité). Son infrastructure présente cependant des faiblesses sur 2 points majeurs :
    • Isolation acoustique très mauvaise, surtout côté rue de la Loi, mais aussi entre « meeting rooms » et « open space » ;
    • La régulation de la température est très mauvaise : trop froid l’hiver, trop chaud l’été.
  • Le travail en open space était nouveau pour tous les collègues de la CNECT Bruxelles, l’adaptation demeure encore aujourd’hui un challenge pour beaucoup : la moindre conversation ou call dérange tout le monde, et des « quiet rooms » sont prévues à cet effet (une par unité) mais elles sont très souvent occupées.
  • Le « hot desking » est aussi un challenge, car on ne peut savoir à l’avance si on trouvera un bureau où s’installer auprès des collègues (sinon quel intérêt de venir au bureau si c’est pour se retrouver seul?).
  • Le télétravail est le mode d’organisation prédominant dans mon unité, mais aussi ma DG. L’obligation est de venir au bureau 2 jours sur 5, et d’être notamment présent le jour de la réunion d’unité – le jour où l’on trouve difficilement un poste de travail proche de ses collègues directs.
  • Dans les faits, le télétravail est organisé de façon très souple, en fonctions de la nature du travail (dossiers, réunions internes, externes etc.) et à ma connaissance la hiérarchie ne fait pas de contrôle strict et régulier.

Après 2 années au L-51, le bilan que je peux retirer est le suivant :

  • L’intérêt de venir au bureau en dehors des réunions est très limité, car on ne peut savoir quels collègues seront présents, les nombreuses réunions nous obligent à nous isoler pour ne pas déranger les collègues et le travail nécessitant une concentration souffre des nombreux passages et discussions.
  • Le télétravail depuis la maison a pris une grande place dans mon organisation personnelle et ma productivité : plus de confort, de calme, pas de transports en communs les jours où je reste à la maison, et je peux plus facilement enchaîner les réunions depuis mon ordinateur, donc je travaille 3 jours par semaine depuis la maison et j’y trouve mon compte.
  • Si des cuisines ont été installées à chaque étage, nous avons perdu notre cafétaria, et dans les faits, très peu de collègues se déplacent à la plus proche, INTPA L-43 du fait des files et du bruit ambiant. Ce qui signifie qu’en plus d’avoir moins de possibilités pour se voir, les chances pour faire du « small talk » avec les collègues – essentiel pour le team building – sont encore plus minces. Apparemment notre DG avait insisté auprès de l’OIB pour avoir une cafétaria mais sans succès.
  • Malgré nos remarques répétées, après 2 ans une seule fontaine a été installée, au 7e étage, et les distributeurs payants sont souvent vides, et il m’arrive fréquemment d’aller remplir mon verre aux toilettes
  • La descente au parking est très glissante quand on vient à vélo, un collègue a d’ailleurs eu un accident avec fractures
  • Pas de « team building events » depuis 2 ans dans mon unité et ma Direction alors que, selon moi, c’est vraiment devenu une nécessité pour assurer la cohésion et le Team spirit
  • Pas de bilan sur l’organisation du travail, que ce soit en mode participatif ou « survey », à l’exception d’une réunion organisée par le management dans les mois ayant suivis notre installation (je ne dis pas qu’il ne se passe rien et peut-être n’ai-je pas prêté attention aux e-mails à ce sujet).
Appel à témoignages et opinions 

Merci de nous faire parvenir vos témoignages sur les actuelles méthodes d’organisations et conditions de travail en utilisant la boîte fonctionnelle rep-pers-osp-u4u@ec.europa.eu . Anonymat garanti.

Usage des téléphones personnels pour des raisons de travail

L’arbre qui cache la forêt

La Commission européenne a récemment demandé, dans le cadre du dialogue social, l’opinion des syndicats sur une proposition de décision fixant une base légale pour l’utilisation des téléphones portables personnels pour des raisons de travail.

Cette décision a pour objet de fixer un cadre et des limites pour cette pratique déjà, dans les faits, répandue dans les différents services de la Commission.

Il s’agit, en particulier, de limiter la possibilité pour un « line manager » de contacter un membre de son équipe sur ses outils de communication personnels dans un certains nombres de cas strictement limités, à savoir les situations d’urgence, les situations liées à la « business continuity » et les situations consécutives à un accord mutuel explicite.

Dans ce cadre, et en étroite avec les autres organisations syndicales, nous veillerons évidemment à ce que ces circonstances soient très clairement définies (Qu’entend-on exactement par « urgence » ? Quelles sont les conditions pour qu’on puisse considérer qu’il y a un accord mutuel ? etc.) et nous demanderons évidemment toutes les garanties pour le respect de la vie privée et pour la possibilité pour ceux qui le souhaitent d’être contactés autrement que par un numéro de téléphone personnel.

Au-delà de ces négociations en cours, les questions soulevées par l’administration concernant l’usage des téléphones personnels dans le cadre du travail, s’inscrivent pour nous dans un cadre plus large.

Si des pratiques qui, jusqu’ici, ne faisaient l’objet que d’un nombre très limité d’abus ou de contestations, elles doivent aujourd’hui être formalisées dans une décision. C’est en effet l’évolution technologique et les changements que cette évolution a induit dans l’organisation du travail qui ont ouvert la porte à de nouveaux défis pour le personnel.

Ces défis, sont les suivants :

  • L’intensification du travail avec de plus en plus de missions à couvrir par la Commission, sans que les moyens budgétaires et humains ne soient augmentés en proportion. De ce fait la charge de travail s’accroît. Cette situation pousse certains de nos collègues à refuser des pratiques qui ne posaient pas de problème il y a quelques années, pour résister dans une certaine mesure à une charge de travail excessive. Il y a donc une réticence à accepter l’utilisation des téléphones privés dans le cadre du travail. Cette intensification du travail n’est pas documentée alors que cette question devrait, en tant que telle, faire l’objet d’un dialogue social.
  • Le développement de nouveaux outils informatiques permettant un travail à distance en temps réel
  • Ce contexte technique a aussi pour conséquence une accélération générale du rythme de travail. Le travail continue de s’intensifier ce qui augmente encore l’effet déstabilisant de cette situation pour le personnel. De nombreux collègues sont sensibles à cette déstabilisation, ce qui peut créer un sentiment de désadaptation au travail et de démotivation chez certains. Là aussi il serait nécessaire de documenter les conséquences du télétravail sur l’intensification du travail.
  • Notre difficulté à nous adapter à la nouvelle culture de travail qui émerge de ce nouveau contexte, avec, pour certains managers, la tentation de maintenir une approche de « commande et contrôle » qui n’est plus adaptée.
  • Le délitement du lien avec les collègues, en particulier dans ses aspects informels (prendre un café ensemble, discuter dans les couloirs, etc.), comme conséquence de l’extension du télétravail. Nous devons imaginer et mettre en place des méthodes qui permettent et favorisent les coopérations et les interactions lors de l’exercice du travail hybride.

Au vu des quatre enjeux majeurs que nous signalons ci-dessus, la mise en place d’une décision spécifique sur l’usage des téléphones privés, ne peut être une réponse suffisante. Nous ne pouvons plus, par ailleurs, nous satisfaire, pour ce qui concerne l’organisation du travail hybride, d’une réglementation floue et imprécise prenant la forme de « questions fréquemment posées » ou « FAQ » sur la manière de gérer le temps et les interactions en contexte de travail hybride.

Ouvrir un véritable dialogue social sur les conséquences tant sur le bien-être que sur la productivité du personnel de ce nouveau contexte de travail est maintenant devenu absolument nécessaire.


Évaluation de la mise en œuvre de la décision sur le temps de travail et le travail hybride 

Un rapport globalement positif mais des ajustements sont nécessaires et des questions sont restées sans réponse

Le rapport sur la mise en œuvre de la décision sur le temps de travail et du travail hybride a été enfin publié le 15 novembre 2023, bien plus tard de l’échéance prévue (fin septembre)  . Globalement il conclut que le personnel est globalement satisfait avec les dispositions actuelles bien que des ajustements s’avèrent nécessaires. En outre, il souligne, dans la limite des données disponibles, que les modalités de travail hybride ont eu des effets positifs, en particulier sur la productivité, l’équilibre entre le travail et la vie privée ainsi que sur l’absentéisme. Toutefois, le rapport passe sous silence des questions importantes, notamment sur le droit à la déconnexion, le bien-être du personnel et le fonctionnement collectif des équipes. Rien n’est dit à propos de la qualité de travail.

Le travail d’évaluation conduit par une équipe interne de la DG HR s’est fondé sur l’analyse de données collectées à partir des pulse surveys, de 13 groupes cibles (personnel, managers, correspondants HR), des sources internes (Sysper) ainsi que des différents avis des comités statutaires. Le rapport contient un grand nombre d’informations, même si des lacunes existent, en particulier sur le niveau de détail requis (par DG/unité, fonction, type de travail, genre) et sur la période relativement limitée (avril 2022- mars 2023) pour la collecte des données.  En outre, la méthodologie d’évaluation inclut un exercice de benchmarking sur les règles et pratiques mises en place dans d’autres institutions européennes et internationales. Les détails de cet exercice n’ont pas été publiés mais plus encore il aurait été judicieux, conformément aux bonnes pratiques internationales en matière d’évaluation de faire recours à des experts indépendants et de se fonder sur les travaux d’instituts et organismes spécialisés, notamment les travaux d’Eurofound.

Sur la base des résultats de l’évaluation, la DG HR estime que « la mise en œuvre de la décision de la Commission sur le temps de travail et le travail hybride fonctionne généralement bien, même si certains ajustements doivent être intégrés. Il fournit une assurance raisonnable quant au respect des dispositions de la décision et à la réalisation des objectifs généraux de la décision ».  En particulier, l’évaluation relève à partir des données du pulse survey de février 2023, un taux de satisfaction très élevé (83%) sur les conditions de travail hybride, même s’il convient de relativiser ce résultat puisqu’environ 40% du personnel a répondu à l’enquête. Il y a donc lieu de s’interroger sur la signification de ce degré de participation, mais surtout de la part du personnel (10%) ayant répondu négativement sur la base de leur propre expérience. 

Le rapport met également en avant une amélioration de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée et un impact positif sur les émissions de CO2 à travers la limitation des déplacements journaliers et des espaces de bureau qui contribuent à réduire la consommation d’énergie. La DG HR souligne que la majorité du personnel a bénéficié de manière équitable de la mise en œuvre de la décision tout en reconnaissant qu’il reste à faire un effort d’adaptation des Directions générales à leurs besoins spécifiques.

Toutefois, l’évaluation n’aborde pas sur le fonds des questions essentielles pour bien comprendre la portée des changements introduits par l’organisation du travail hybride. En premier lieu, la question de la productivité n’est pas traitée directement, même si l’on mentionne que le travail hybride est potentiellement une source d’efficience en l’absence de données empiriques. Mais qu’en est-il de la qualité du travail si elle n’est pas appréhendée par la perception qu’en ont les managers ? Et la cohésion des équipes et son corollaire essentiel, la transmission et le partage des savoirs, dont on conviendra que la généralisation du travail hybride a eu des répercussions négatives.  La productivité, difficile à mesurer au sein des administrations publiques est certes, une notion distincte de l’intensité du travail, ce qui signifie que la durée du travail s’allonge au-delà des 40h hebdomadaires en raison des rythmes de travail accrus auxquels sont soumis la plupart des agents de la Commission. On regrette que ces dimensions, qui sont inhérentes au mode de travail hybride, n’aient pas été explorées de manière approfondie.

En deuxième lieu, l’application du droit à la déconnexion – dont la résolution du Parlement européen du 21 janvier 2021 a fourni des recommandations à la Commission- n’est pas examinée dans le rapport d’évaluation. Plusieurs comités ont souligné l’importance de faire respecter ce droit au-delà d’une simple recommandation, surtout dans un contexte où le personnel est soumis à une surcharge de travail, qui souvent va de pair avec un accroissement des risques psycho-sociaux liés à une hyper-connectivité, l’absence de séparation claire entre vie professionnelle et vie privée ainsi que l’isolement social. Les données fournies dans le rapport sur les crédits d’heures supplémentaires et le taux d’absentéisme pour maladie ne reflètent pas la réalité de ces phénomènes plus profonds.

La DG HR propose un certain nombre de recommandations visant en particulier à renforcer une nouvelle culture de travail à travers des actions de guidance et de sensibilisation du personnel et des managers, ce qui représente la reconnaissance sur les insuffisances situation actuelles :

  • l’intégration des nouveaux arrivants et le renforcement de la cohésion des équipes ;
  • la possibilité d’adapter les modalités de travail pour répondre à des situations spécifiques, par exemple la garde des enfants ou la charge de personnes ayant un handicap ;
  • l’amélioration des outils existants et un suivi renforcé des dispositions en vigueur.

Toutes ces propositions seront détaillées dans un plan d’action qui devra faire l’objet d’une consultation des OSP et des comités statutaires.

Il est également important de réfléchir sur l’avenir du Comité Paritaire sur le Travail Hybride (CPTH), dont le rapport mentionne qu’il « devrait consolider et renforcer son rôle dans le suivi de la mise en œuvre de la Décision ». Pour ce faire, il suggère également « d’inclure la possibilité d’examiner les cas individuels », ce qui est exclu en l’état actuel. C’est une proposition à laquelle nous sommes fermement opposés car cela ne fait pas partie du mandat du Comité, qui, selon la Décision, doit effectuer des tâches de suivi et d’évaluation, qui, jusqu’à présent, ont été très limitées.      

En ce qui nous concerne, nous plaidons pour une approche holistique qui englobe les aspects de bien-être au travail pour accroître l’épanouissement professionnel du personnel. Le bien-être au travail ne se réduit pas à de simples facteurs individuels et psychologiques, mais doit tenir compte du contexte dans lequel l’on travaille, le type de management, le climat social, les restrictions budgétaires qui peuvent engendrer, surtout pour les catégories plus démunies, de grandes souffrances.  


Le Télétravail : source de productivité et de bien-être des travailleurs ? Débattons-en.

Suite à la crise sanitaire et au confinement qui en a résulté, une nouvelle façon de travailler a vu le jour : le travail hybride où le distanciel mixé au présentiel fait partie de nos habitudes.

Si l’on en croit les résultats de l’Évaluation de la mise en œuvre de la décision de la Commission sur le Temps de travail et le travail hybride publiée en novembre dernier, dans l’ensemble, le personnel et la direction apprécient globalement les changements et la flexibilité des conditions de travail. Cependant, le nombre assez faible des participants à l’enquête faite nous obligent à relativiser la portée de ce résultat.  De même, on ne connaît pas encore les raisons des opinions négatives.

Cette évaluation de la décision a montré, selon la DG HR, que « la productivité du travail a été assurée, tandis que les nouvelles conditions de travail ont amélioré l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée et ont réduit les différents types de congés et le travail à temps partiel. » Pour conclure cette évaluation, le personnel aurait combiné de manière adéquate le travail au bureau et le télétravail avec une moyenne de 54% du temps de travail du personnel passé au bureau (pour plus de détails, cf. article du Link « Évaluation de la mise en œuvre de la décision sur le temps de travail et le travail hybride« ).

Cette nouvelle façon de travailler suscite de nombreuses discussions et dès lors mérite la poursuite d’une réflexion plus approfondie en se référant également à la littérature existante sur cette thématique.

Le 26 octobre dernier, Claudia Senik, Professeur à l’Université de la Sorbonne et à l’École d’économie de Paris (PSE) animait une de nos Conférences GRASPE dont le titre était « Le télétravail est-il favorable au bien-être des salariés ? ».

Sa présentation, basée sur moultes études et enquêtes, a mis à plat de nombreuses questions ouvertes qui d’ores et déjà nous amènent quelques pistes de réflexion.

Voici un aperçu de cette conférence :

1. Taux « effectif » du travail au bureau et du travail à domicile

Des études américaines ont montré, que les taux d’occupation des bureaux aux États-Unis aujourd’hui (en octobre 2023) sont à 50% de leur niveau avant Covid : il n’y a plus, en moyenne, que la moitié des surfaces de bureau qui sont occupées.  Mais, aujourd’hui on voit une sorte de tentative de retour en arrière par les employeurs qui sont en train d’essayer de refaire faire revenir leurs salariés dans les bureaux – parce que finalement « il y aurait quand même quelques inconvénients au télétravail« . Ainsi, l’entreprise Zoom elle-même, qui est la plus grande pourvoyeuse de communication à distance, a décidé que tous ses employés qui vivent à moins de 80 km de leur bureau doivent maintenant revenir travailler au bureau deux fois par semaine au moins.  Il y a donc une tension entre ce que veulent les salariés ou ce que font les salariés et puis ce que voudraient les employeurs.

Le “Global Survey of Working Conditions”, enquête en ligne menée dans 34 pays du en avril-mai 2023 auprès de travailleurs et d’employeurs, fait le constat qu’il y a un quart des jours de travail qui est fait à distance et un tiers des travailleurs qui travaillent à domicile, soit tout le temps, soit une partie du temps.

Plus précisément, il y a :

  • 67% des gens qui travaillent encore cinq jours par semaine dans les locaux de l’entreprise,
  • 26% qui ont un arrangement hybride et 8% qui sont à temps plein à domicile. À noter que ce constat varie selon les pays : le niveau de travail à domicile est plus élevé dans les pays anglophones.

Il en résulte que les salariés voudraient travailler à distance deux jours par semaine dans le monde, et les employeurs voudraient laisser les travailleurs travailler à distance un jour par semaine.

Dans tous les pays, il y a un jour d’écart entre ce que voudraient les travailleurs et ce que voudraient les employeurs.

2. Principaux avantages du travail au bureau et du travail à domicile

Avantages du travail au bureauAvantages du travail à domicile
Socialisation avec les collèguesAbsence de trajet
Limites plus claires entre le temps de travail et le temps personnelÉconomie de frais de transports et de repas
Meilleur équipementDavantage de flexibilité en matière d’organisation de la journée
 Gain de temps
 Davantage de temps calme pour soi, pour la famille et les amis

Les avantages mis en exergue sont essentiellement ceux qui ont trait à l’auto-organisation et à la vie en général, mais pas au travail lui-même, ce qui pourrait expliquer pourquoi finalement, il y a cette différence entre ce que veulent les employés et ce que veulent les employeurs.

Cependant, les auteurs ont remarqué que :

  • les jours où les gens sont à domicile, ils travaillent moins d’heures. Ils travaillent en moyenne 80 minutes de moins, les jours où ils sont chez eux. En revanche, ils travaillent plus d’heures, les jours où ils sont dans l’entreprise, et ils travaillent aussi le week-end et le soir.
  • les gens qui bénéficient du travail à domicile disent que c’est pratique, parce qu’ils peuvent se rendre au rendez-vous chez le dentiste, aller chercher leurs enfants à l’école, faire du sport, etc… .
  • les télétravailleurs continuent, même lorsqu’ils sont au bureau, à communiquer davantage par messagerie individuelle: le télétravail a habitué les gens à un style de communication synchrone (j’envoie un message quand ça m’arrange, je réponds à un message quand ça m’arrange).

L’argument du gain de temps avec les trajets prévaut largement dans la balance.

La communication virtuelle constitue un véritable changement persistant qui a été introduit par le télétravail.             

3. Liens entre télétravail et bien-être

Des expériences de terrain portant sur le choix des travailleurs à télétravailler ou non ont démontré qu’en moyenne les gens, principalement les plus qualifiés et qui ont des trajets plus longs, se montraient prêts à accepter un salaire inférieur de 8% pour avoir la possibilité de télétravailler.

Ces expériences ont d’ailleurs montré que pour les travailleurs qui avaient eu la possibilité de travailler de manière hybride, la productivité n’avait pas baissé, la satisfaction au travail avait augmenté tandis que les démissions avaient baissé de 35% par rapport à ceux qui continuaient à venir au bureau.

Sur base de ces expériences sur le terrain, la proposition de travail hybride s’est alors vu généralisée à l’ensemble des sociétés concernées pour celles et ceux ayant un travail qui est plus naturellement réalisable à distance ou qui sont plus habitué(e)s à s’auto-organiser.

Pour ce qui concerne l’obligation éventuelle de revenir complètement au bureau, il y a un quart d’employés au niveau mondial, parmi ceux qui pratiquent déjà le télétravail, qui disent qu’ils quitteraient leur emploi si leur employeur voulait les forcer à revenir 5 jours par semaine au bureau.

La conclusion, c’est que le bien-être de travail déclaré par les télétravailleurs est beaucoup plus élevé et le taux de démission a été divisé par deux : quand on laisse les gens travailler chez eux, cela augmente leur bien-être et leur possibilité de rétention.

Cependant, il est important de souligner l’hétérogénéité individuelle : tout le monde n’apprécie pas de la même manière cette possibilité de travailler à domicile. Il y a des différences parfois imperceptibles entre les gens, des caractéristiques qui tiennent à la personne et non pas à la pratique du télétravail ou pas.

4. Est-ce que le télétravail rend les travailleurs «  heureux »

  1. Identification de sources du bien-être au travail :
    • L’autonomie.
      La liberté est un facteur favorable au bien-être au travail : les gens sont plus heureux en général dans des petites unités, ou en tout cas quand la chaîne est hiérarchique et moins longue, quand ils peuvent davantage décider de la manière dont ils font les choses.
    • L’équilibre entre vie privée et vie professionnelle
      A priori, le télétravail, c’est bien, puisqu’il permet d’aller chercher les enfants à l’école, etc. Mais, on s’est rendu compte concrètement que ça crée une porosité entre la vie professionnelle et la vie privée qui est source de tensions et notamment auprès des femmes pour qui le Covid et le travail à la maison n’était pas un facteur d’augmentation de bien-être.
      Pourtant les femmes sont toujours plus demandeuses de télétravail que les hommes. Mais, c’est sur elles encore que repose plus largement et le plus souvent la charge de famille. Toutes les études montrent que quand elles travaillent à domicile, il y a un effet négatif sur leur santé mentale. Les femmes n’ont pas raison de vouloir télétravailler plus que les hommes. À moins que le télétravail ne marche comme un révélateur de la répartition des tâches entre les hommes et les femmes…
    • Le capital social, c’est-à-dire la qualité des relations au sein du collectif.
      L’échange entre collègues n’est pas forcément bilatéral, ça peut être aussi multilatéral (est-ce que je peux demander un service à quelqu’un, qui peut me demander une information ; est-ce qu’on a des échanges, des services coopératifs ?…).
      Les gens s’entraident : c’est ce qu’on appelle capital social. Mais il faut du temps pour que la confiance s’installe et que le comportement coopératif entre les collaborateurs s’installe et l’information s’échange. Ce n’est que dans le « travailler ensemble » qu’on apprend à se connaître voire à anticiper beaucoup plus facilement les réactions des gens dans des situations qui n’ont pas été prévues sans nécessité de s’envoyer des millions de messages. Il est vrai toutefois que pour certains, quand les relations sociales au bureau sont désagréables ou mauvaises, le travail à distance allège les tensions : cela peut aller dans les deux sens.
    • Les perspectives de progression.
      Les travailleurs ont des attentes et vivent avec les anticipations de ce qui va se passer à l’avenir. Aussi, les perspectives de progression en termes de responsabilités, promotions, etc… sont plus complexes à gérer lorsque l’on travaille à distance. En étant plus loin du centre de décision, on comprend moins bien les perspectives fixées par la hiérarchie, ce qui n’est pas forcément une très bonne chose.
    • La question de la signification/du sens du travail.
      Le fait de ne pas être sur place réduit quelque peu l’identité au travail (Est-ce que ce que je fais a du sens ? Est-ce que l’impact de l’entreprise est bon, et me plaît ? Est-ce qu’il y a une congruence entre mes valeurs et celles de mon employeur ? Est-ce que mon identité au travail est forte ? )
      Pour disposer d’une réelle identité au travail, le travailleur a besoin d’avoir un décor, des costumes, un scénario et cela ne se fait que lorsque l’on est en présence réelle les uns avec les autres (cf. Erwin Goffman, sociologue).

  2. Identification des risques psycho-sociaux et du mal-être :
    • Rallongement de la durée du temps de travail
      Le fait de supprimer les trajets est forcément une bonne chose, mais le travail à distance entraîne des durées de travail qui peuvent être plus longues, moins synchronisées, ce qui peut être un facteur déstabilisant.
    • Diminution de soutien de la part des collègues
    • Mélange entre vie privée et professionnelle
      Ce mélange a donné lieu à l’apparition du terme “technostress”, c’est-à-dire une surcharge de travail, – où l’on ne sait pas si l’on est en train de travailler ou de ne pas travailler -. On ne plus jamais sortir de cette demande exercée par le travail, ce qui peut conduire à une certaine tension et stress.

Tous ces canaux peuvent être activés ou désactivés de manière positive : les sources du bien-être du travail sont du côté du bureau, et les sources d’équilibre sont du côté du domicile. On perd donc quelque chose de la vie du bureau quand on reste chez soi : ce serait le capital social à savoir les interactions avec les autres, le sentiment d’appartenir à un collectif coopératif, et d’être au courant de toute l’information qui circule…

Cette perte de capital social peut mener à un sentiment de déstabilisation.

5. Y-a-t-il une solution optimale pour la mise en œuvre du télétravail ?

Si le télétravail permettait de bénéficier de tous les avantages d’autonomie et d’interaction réelle avec le collectif, il pourrait effectivement être une bonne solution.

D’un point de vue individuel, le télétravail semble idéal : je viens au travail quand je veux et quand je viens, je peux voir des collègues, échanger, participer à des séminaires, etc.

Mais il ne faut pas oublier que les actions individuelles s’agrègent nécessitant un phénomène de coordination: si quand je viens au bureau, il n’y a personne, cela n’aura aucun intérêt, à moins qu’il ne s’agisse de questions de logistique et de confort matériel, si le domicile est moins adapté que le bureau.

Alors, comment coordonner les travailleurs qu’ils soient présents au même moment ?

  • Si l’employeur a une grande masse salariale avec des équipes, il peut décider que certains jours, toute l’équipe doit être là.
  • Mais si l’employeur dispose d’une moindre masse de salariés, cela veut dire que certains jours les bureaux seront vides, ce qui pose la question des locaux, à moins de mettre en place une rotation.
  • Il faut aussi s’interroger sur s’il faut laisser les travailleurs décider des jours de leur présence au bureau.


Les employeurs devront trouver des solutions pour gérer ces problèmes de coordination.

6. Conclusion 

La question standard est celle de la satisfaction dans la vie.

Le confinement qui a mis les travailleurs en télétravail intégral a été un choc négatif sur leur satisfaction de la vie et leur santé mentale.  Notamment, ont été observées des difficultés à se concentrer, le sentiment d’être inutile, et surtout pour les mères d’enfants en âge scolaire. De manière générale, on a donc observé un effet négatif sur ces deux plans.

En revanche, il n’y a pas eu d’effet négatif sur les travailleurs qui étaient en télétravail partiel. C’est donc l’aspect intégral qui est nocif.

Il y a des choses qui sont positives et négatives dans le télétravail. Les travailleurs veulent du télétravail au moins à temps partiel. Les employeurs préfèreraient leur en donner un peu moins. Mais quand ils sont totalement en télétravail, les salariés ne sont pas spécialement heureux. On a vu que ce ressenti du travailleur est dû aux avantages et aux inconvénients du télétravail, avec le risque que ce soient ces derniers qui prennent le dessus.

Il nous faudra prester attention à toutes ces questions posées. On navigue entre différents écueils.

Ces questions ouvertes incombent aux managers, mais c’est aussi à nous tous, les travailleurs, d’avoir des idées…


Leadership participatif dans le vocabulaire des institutions européennes. Nous vous en disons plus !

Compte tenu de la complexité croissante des défis auxquels la Commission européenne est confrontée et de la nécessité de faire toujours plus avec moins, un changement est en cours depuis plusieurs années : Le leadership participatif (LP), qui consiste à abandonner la gestion descendante (top-down) au profit d’un processus décisionnel collaboratif.

Le LP favorise l’intelligence collective en encourageant la diversité des points de vue et des expertises. Grâce à un dialogue ouvert et à la collaboration, il exploite les connaissances collectives de son personnel diversifié, ce qui permet de prendre des décisions plus éclairées et de trouver des solutions novatrices à des problèmes complexes plutôt que de s’en remettre uniquement à des décisions hiérarchiques.

Cette approche renforce l’intelligence globale de l’organisation en s’appuyant sur les expériences et les points de vue de collègues issus de services et d’horizons différents.

Le défi consiste à créer des conversations significatives basées sur les éléments clés suivants afin de faciliter les dialogues qui vont au-delà du simple échange d’informations :

1. Instaurer la confiance : créer un environnement dans lequel les membres de l’équipe se sentent à l’aise pour partager ouvertement leurs pensées, leurs idées et leurs préoccupations en faisant preuve de transparence, de fiabilité et de soutien.

2. L’écoute active : les individus sont véritablement attentifs aux perspectives des autres, cherchant activement à comprendre les différents points de vue et expériences.

3. Dialogue constructif : les conversations se concentrent sur la résolution constructive des problèmes et la génération d’idées, dans le but de trouver des solutions qui profitent à la collectivité.

4. Inclusion : tous les participants, quelle que soit leur position au sein de l’institution, sont encouragés à apporter leur contribution, en veillant à la diversité des parcours, des expériences et des points de vue, en favorisant un sentiment d’appartenance parmi les membres de l’équipe et en reconnaissant la force que cette diversité apporte à la prise de décision.

5. Communication respectueuse : les interactions sont caractérisées par le respect, la courtoisie et la reconnaissance de la valeur que chaque personne apporte à la conversation.

6. Profondeur de la compréhension : les participants cherchent à comprendre en profondeur les raisons et les motivations sous-jacentes aux idées et aux opinions, ce qui facilite une prise de décision plus éclairée. Il peut également être intéressant de poser des questions qui stimulent la pensée critique et créent une culture qui valorise la curiosité et l’apprentissage continu.

7. Empathie : les sentiments et les expériences des autres sont reconnus, ce qui favorise une culture d’empathie et de soutien au sein de l’équipe.

8. Se concentrer sur les solutions : lorsque l’on discute des défis, l’accent est mis sur la recherche de solutions ensemble plutôt que de s’attarder uniquement sur les problèmes.

L’approche du LP permet d’encourager et d’habiliter les membres de l’équipe à s’approprier leur travail et à contribuer de manière significative aux objectifs des institutions.

Bien entendu, changer la culture d’une organisation pour qu’elle valorise et promeuve le LP demande du temps et de l’engagement, et comporte plusieurs défis

Certains collègues peuvent être réticents à s’éloigner des structures hiérarchiques traditionnelles, ce qui rend difficile l’adoption d’approches plus participatives. Nous pouvons également constater que les barrières linguistiques ou la multiplicité des canaux de communication peuvent entraver l’échange d’idées et la collaboration.  Veiller à ce que toutes les voix soient entendues et prises en compte peut s’avérer difficile, en particulier dans des organisations de notre taille. D’autre part, il est essentiel de trouver un équilibre entre l’inclusion et l’efficacité. Parvenir à un consensus dans le cadre de processus participatifs peut prendre plus de temps que dans le cadre d’un processus décisionnel traditionnel du haut vers le bas, ce qui peut affecter la rapidité de la mise en œuvre des décisions. Le personnel peut avoir besoin d’une formation pour développer les compétences nécessaires à une collaboration, une communication et une résolution des conflits efficaces dans un environnement participatif. Des séminaires et des formations ont été mis en place par la DG HR, qui a également encouragé la création d’une communauté de praticiens pour offrir un soutien au niveau interinstitutionnel.

Le modèle de travail hybride peut poser des problèmes supplémentaires

Le recours aux outils numériques pour communiquer pourrait potentiellement entraver les interactions spontanées et informelles qui sont cruciales pour le LP. Les difficultés techniques pourraient constituer un obstacle au bon déroulement des processus participatifs.

En matière d’inclusion, il est important de veiller à ce que les collègues à distance et au bureau aient les mêmes possibilités de participer aux processus décisionnels, car la présence physique peut influencer involontairement la participation.

L’instauration et le maintien de la confiance entre les membres d’une équipe sont essentiels pour le LP. La distance physique qui existe dans les systèmes de travail hybrides peut rendre plus difficile l’établissement et le maintien de la confiance entre les membres de l’équipe. De même, la collaboration spontanée et le partage d’idées peuvent être limités dans les environnements hybrides, ce qui affecte la nature dynamique et interactive du LP.

Pour relever ces défis, les services doivent établir des lignes directrices claires en matière de collaboration virtuelle et favoriser une culture qui valorise et soutient les pratiques participatives, quelle que soit la localisation physique du personnel. En outre, les responsables doivent être proactifs et veiller à ce que les membres de l’équipe, qu’ils soient à distance ou au bureau, se sentent également inclus et engagés dans les processus décisionnels.

Pour relever ces défis, il faut adopter une approche stratégique et patiente, qui mette l’accent sur les avantages à long terme d’une meilleure collaboration, de l’innovation et de l’engagement du personnel.

Idées reçues sur le leadership participatif

1. Le manque de prise de décision : certains peuvent penser à tort que le LP est synonyme d’absence d’actions décisives. En réalité, il s’agit d’une prise de décision en collaboration avec les différentes parties prenantes.

2. Participation égale à toutes les décisions : toutes les décisions n’exigent pas le même niveau de participation. Le LP implique de discerner quand une large collaboration est nécessaire et quand une prise de décision plus rationalisée est appropriée.

3. Un processus qui prend du temps : si les approches participatives peuvent prendre plus de temps pour certaines décisions, cela ne signifie pas que chaque décision nécessite une consultation approfondie. Une approche participative efficace concilie l’inclusion et l’efficacité.

4. Élimination de la hiérarchie : le LP ne signifie pas nécessairement l’élimination de toutes les structures hiérarchiques. Elle implique un style de leadership plus inclusif et collaboratif au sein des structures existantes.

5. Consensus total : obtenir un consensus total dans le cadre d’un processus décisionnel participatif est un véritable défi. Il s’agit de recueillir des informations diverses, de comprendre les points de vue et de prendre des décisions éclairées qui profitent à la collectivité.

6. Mauvaise interprétation des données : les responsables doivent éviter de mal interpréter les contributions participatives. Il ne s’agit pas seulement de recueillir des idées, mais aussi de comprendre et d’intégrer véritablement les différentes perspectives dans le processus de prise de décision.

Une communication et une formation claires sont essentielles pour dissiper ces idées fausses et garantir une mise en œuvre efficace du LP dans les institutions.

Nous sommes de plus en plus souvent invités à participer à des enquêtes. Quelle est leur place dans le LP ?

Si les enquêtes permettent de recueillir des données et des opinions précieuses, elles ne sont pas des méthodes intrinsèquement du LP. Les enquêtes impliquent généralement une communication à sens unique, les participants répondant à des questions prédéfinies. Cela ne correspond pas à la nature interactive et dynamique du LP, qui encourage un dialogue et une collaboration continus.

Le LP met l’accent sur la prise de décision collective et la collaboration, alors que les enquêtes impliquent souvent que les individus répondent de manière indépendante sans participer à des discussions de groupe ou à des processus de prise de décision partagée.

Les enquêtes comportent un ensemble prédéterminé de questions, ce qui limite la flexibilité permettant d’explorer diverses perspectives ou d’adapter l’enquête en fonction des idées qui émergent au cours du processus, ce qui est un aspect clé du LP.

Les enquêtes peuvent manquer de la profondeur nécessaire pour comprendre pleinement le contexte ou les raisons sous-jacentes des réponses des participants. Le LP implique souvent l’exploration de ces nuances par le biais d’un dialogue ouvert.

Les enquêtes peuvent être sujettes à des interprétations erronées, car les personnes interrogées peuvent avoir des interprétations différentes des questions. Le LP vise à parvenir à une compréhension commune par le biais d’une conversation continue et d’une clarification.

Le LP met l’accent sur l’empathie et la compréhension entre les membres de l’équipe. Les enquêtes, qui sont une méthode plus détachée, peuvent manquer l’occasion de développer l’empathie par l’interaction directe et le partage d’expériences.

Si les enquêtes ont leur place dans la collecte de données quantitatives, les méthodes d’apprentissage participatif impliquent souvent des approches plus qualitatives, interactives et continues qui vont au-delà de la nature structurée des enquêtes. Pour être efficace, l’apprentissage par la pratique implique un dialogue permanent, une écoute active et l’exploration collective d’idées et de solutions.

Nous avons voulu aborder la question du leadership participatif parce qu’elle est en accord avec les valeurs d’U4U, telles que l’approche holistique de nos professions, l’inclusion et la diversité sociétale, sociale et cognitive. Jouons tous un rôle actif dans le projet européen, contribuons en étant qui nous sommes, chaque jour.


Le 24 mars 2022, la Commission a adopté la décision C(2022) 1788  relative au temps de travail et au travail hybride. 

Travail hybride : que doit-on évaluer ?

La décision C (2022) 1788 sur le travail hybride et le temps de travail fait du télétravail un droit et met le travail au bureau et le télétravail sur un pied d’égalité. Elle repose sur deux piliers essentiels : l’aménagement flexible du temps de travail et un système de management basé sur la confiance. Elle se fixe comme objectif principal d’améliorer l’efficacité du travail tout en conciliant la vie privée et la vie professionnelle des fonctionnaires et agents des institutions européennes. Cependant, la réalisation de ces objectifs présuppose que l’on évite les risques psychosociaux pour les télétravailleurs et que celle-ci — ne compromette pas la cohésion de la fonction publique européenne.  

L’exercice d’évaluation lancé par la DG HR montre sur la base des données d’enquête auprès du personnel un certain niveau de satisfaction, y compris des managers, bien que de nombreuses questions demeurent, en particulier quant à la mise en œuvre de la décision. Globalement, le travail hybride et son corollaire, la flexibilité du temps de travail, ont ainsi répondu aux objectifs d’efficacité et de conciliation de la vie privée et professionnelle. Plusieurs éléments positifs ont ainsi été avancés dans les avis formulés par les différents comités, notamment le management basé sur la confiance, la flexibilité accrue, les différentes modalités énoncées dans la décision qui reconnait le travail hybride comme un droit (20 % du temps de travail) et sur base volontaire, le droit à la déconnexion, les 10 jours de télétravail à l’étranger et enfin la création d’un comité paritaire.    

Il faut reconnaitre que nous sommes dans une période transitoire d’une transformation fondamentale des modes de travail de la Commission et qu’il faudra du temps pour comprendre son impact potentiel et ses implications plus larges sur le fonctionnement de notre institution. C’est pourquoi il nous faut mettre en place des outils de suivi et d’évaluation rigoureux ainsi que des procédures de communication et de transparence adéquates. En ce sens, le comité paritaire sur le travail hybride (CPTH) a un rôle important à jouer. Toutefois, celui-ci ayant passé plusieurs mois à discuter des règles de procédure, n’a pas pu consacrer le temps nécessaire au travail d’évaluation, y compris à travers l’implication d’experts et la revue de la littérature existante. De ce fait, il ne dispose pas de données détaillées (par exemple par âge, genre et lieu de travail) ni une méthodologie objective d’évaluation pour pouvoir évaluer les mérites des dispositions actuelles en matière de travail hybride.

Dans un but constructif, U4U voudrait soulever un certain nombre de questions afin de nourrir l’exercice d’évaluation en cours. Celles-ci découlent en grande partie de notre document sur les 21 thèses sur le télétravail qui avaient été élaborées en 2022 où nous affirmions que le télétravail est « flexible, volontaire et basé sur la confiance ».

En premier lieu, ce qui est important pour une fonction publique moderne est de pouvoir fonctionner de manière efficace avec un mode d’organisation flexible et des outils et infrastructures appropriés. Assurer une présence au bureau sur base hebdomadaire est un moyen de garantir une interaction régulière entre les membres d’une équipe ainsi qu’avec des membres externes, donc les collectifs de travail et la cohésion des équipes, condition nécessaire pour leur efficacité. Ceci suppose au préalable des arrangements formels ou informels en matière de travail hybride, qui permettent aux managers d’organiser le travail des équipes ainsi qu’une meilleure organisation de l’équilibre entre vie familiale et travail professionnel. Par exemple, le Parlement européen envisage de fixer le télétravail à deux jours par semaine, mais permet plus de flexibilité. Les agents peuvent ainsi prendre une semaine complète de télétravail puis être présents toute la semaine suivante à leur bureau. Or cette flexibilité est rendue difficile si ce n’est impossible à la Commission à cause de la politique des bâtiments qui tend à réduire fortement le nombre de places disponibles.

En second lieu, il faut évaluer si le droit à la déconnexion, qui est réglementé dans la plupart des États membres, a été respecté et s’il a été mis en œuvre de manière uniforme et cohérente. Un des risques importants associés au travail hybride est qu’une partie du personnel de la Commission tend à rester connecté en permanence, travaillant au-delà des horaires de travail et pendant les périodes de déconnexion, les fins de semaine et jours de fête. Il en résulte que les frontières entre sphère de travail et sphère familiale/privée deviennent de plus en plus floues. Une étude récente conduite par Eurofound[1] (2022) tend à montrer qu’il y a globalement un accroissement de la charge de travail dû à une hyperconnectivité (par exemple, lire et répondre aux emails à tout moment) et donc une intensification du travail, sans que ceci s’accompagne nécessairement par des gains productivité. Des pratiques analogues tendent également à se développer au sein des services de la Commission. Le droit à la déconnexion doit donc être encouragé à tous les niveaux afin de sauvegarder le bien-être et la santé des fonctionnaires et agents de la fonction publique européenne.

En troisième lieu, en relation avec le non-respect du droit à la déconnexion, les risques psychosociaux liés à une surcharge de travail doivent être mieux appréhendés à travers des données d’évaluation objectives qui restent à construire vu la pauvreté d’informations en la matière. La décision sur le travail hybride (art 14) met l’accent sur deux aspects : la responsabilité des managers qui devront suivre des formations adaptées afin d’éviter les « risques et dangers possibles d’une surcharge numérique et de burnout numérique » ; la responsabilité individuelle du personnel qui devra prendre des « mesures préventives » pour éviter des risques physiques dans son espace de télétravail tandis que la « Commission organisera des campagnes de prévention régulières et adéquates en matière de santé et de sécurité au travail ». Ceci est le minimum indispensable, mais il faut une approche holistique qui couvre tous les aspects du bien-être et de la santé au travail, y compris un environnement de télétravail ergonomique et surtout des règles bien plus contraignantes pour éviter des situations de stress et de burnout dont les coûts humains doivent être davantage intégrés dans l’exercice d’évaluation.

En quatrième lieu, le droit d’utiliser 10 jours de télétravail ouvrables à l’étranger à différentes périodes de l’année ou en complément avec des congés annuels ou parentaux doit être préservé. L’enquête menée par la DG HR montre que ce droit est largement utilisé par les fonctionnaires et agents, ce qui tend à montrer qu’il répond à un réel besoin de flexibilité. Toutefois, il s’avère nécessaire d’évaluer, comme l’indique l’avis du COPEC, dans quelle mesure son utilisation n’est pas restrictive ou discriminatoire vis-à-vis des femmes (qui utilisent davantage cette forme de travail), par exemple dans les périodes de fermeture occasionnelle des bâtiments. En cas d’autorisation exceptionnelle, comme le permet la Décision il faudra veiller à établir un équilibre entre davantage de flexibilité et la nécessaire efficacité du travail qui dépend aussi de l’interaction physique entre collègues et de la cohésion des équipes de travail. Cette liste de questions n’est pas exhaustive, mais reflète l’état des discussions dans le Comité paritaire et des autres comités qui ont émis des avis en la matière. De manière générale, il en ressort, sans que cela préjuge des conclusions de l’exercice d’évaluation, que la Décision est équilibrée et que ses principes de base doivent être préservés, même si des améliorations s’avèrent nécessaires sur certains aspects à la lumière de l’expérience acquise à ce jour. Étant donné le court délai à notre disposition, il est évident que l’exercice d’évaluation sera limité et qu’il faudrait davantage de temps pour pouvoir avoir une vue d’ensemble sur la mise en œuvre de la Décision et son impact sur le fonctionnement de notre Institution. À cet égard, il est essentiel que le Comité du Personnel et les différents Comités puissent compléter leurs avis respectifs sur la base des informations demandées à la DG HR, à défaut d’une consultation d’experts dont on aurait eu grandement besoin si ce n’est en raison du manque de temps. Il en va aussi de l’avenir de la fonction publique européenne et de son mode de fonctionnement.


[1] Eurofound, The rise of telework and the impact on working conditions and regulations, 2022. Voir aussi la conference dans GRASPE n.47 ,  https://graspe.eu/document/grasp47.pdf  

Télétravail et bien-être

L’article suivant de ce numéro 101 du Link porte sur le travail hybride. Pour contextualiser cette réflexion, que nous menons déjà depuis deux ans, nous tenons à faire un bref état de littérature scientifique sur la relation entre télétravail et bien-être. Cela permettra de voir quels sont les effets de ce mode de travail, dont l’usage croît, en dehors des institutions européennes[1].

Selon une étude réalisée en 2023 dans 34 pays différents, en plusieurs vagues et regroupant plusieurs dizaines de milliers de participants[2], 56 % des interrogés souhaitant travailler au moins un jour par semaine en télétravail, cela va jusqu’à 2 jours pour 19 % d’entre eux voire 3 jours (17 %). Dans le même sens, lors d’une étude menée en 2017 auprès de 7000 salariés étatsuniens[3], Alexandre Mas et Amanda Pallais ont constaté que les travailleurs étaient prêts à accepter un salaire en moyenne 8 % pour plus bas si l’emploi considéré propose du télétravail[4]. Selon ces mêmes auteurs, un des éléments déterminants dans le choix du télétravail serait la réduction des trajets entre travail et domicile.
Pour autant, si l’on en croit les études menées avant l’épidémie de Covid-19, faire du télétravail ne rend pas forcément plus heureux. En effet, Sabrina Pablionia et Victoria Vernon pointent dans une analyse de 2022, s’intéressant aux salariés étatsuniens uniquement, que le télétravail ne leur permette pas toujours de passer plus de temps en famille, de s’occuper des tâches ménagères ou de dormir plus longtemps[5].

Cette dichotomie entre ce que souhaitent les travailleurs et les effets du télétravail une fois qu’il est mis en place semble être le nœud du problème. L’expérience souvent forcée du télétravail pendant le Covid-19 a exacerbé cette tension. Ainsi, des études menées au Royaume-Uni[6] et en Allemagne[7] avant et pendant le Covid-19 montrent que le télétravail pendant cette période s’est révélé dommageable pour la santé des personnes le pratiquant. Les foyers étudiés étant encore largement ancrés dans une répartition traditionnelle et genrée des tâches ménagères, héritage de la société patriarcale, se sont bien souvent les femmes qui ont le plus souffert du télétravail durant l’épidémie. Cela est notamment dû au fait que les enfants suivaient l’école à la maison, ce qui a constitué une charge supplémentaire inégalement répartie dans les ménages[8]. Notons toutefois que le Covid-19 et les confinements/déconfinements successifs liés à cette période altèrent fortement la nature du télétravail. De nombreuses familles, notamment issues des milieux les plus précaires, se sont retrouvées confinées dans des logements bien souvent trop étroits et n’avaient plus de vie sociale en dehors du cercle familial. Que dire encore des étudiants isolés, ayant souvent perdu le travail alimentaire qui leur permettait de payer leur loyer, ou des violences faites aux femmes[9] et aux enfants[10] qui ont aussi explosé durant cette période. Tout cela rend donc difficile l’isolation des variables permettant de dire que le télétravail fut nocif pour les salariés des autres facteurs propres au Covid. Les éléments négatifs avancés par les études menées en Allemagne et au Royaume-Uni, comme la perte des contacts sociaux et de la flexibilité, sont tout aussi imputables au télétravail qu’aux mesures de gestion de l’épidémie déployées par les gouvernements.

À la suite de ces réflexions, on peut penser que le travail hybride serait un bon compromis pour la majorité des travailleurs. L’enquête menée Aksoy et ses collègues[11] donne à voir les avantages les plus fréquemment cités pour le télétravail : « Pas de trajet », « Moins de temps pour se préparer au travail », « Horaire de travail flexible », « Calme » et « Plus de temps avec les amis et la famille » et pour le travail sur site : « Collaboration en face à face », « Socialisation », « Limites entre travail et vie personnelle », « Meilleur équipement », « Face-à-face avec mon responsable » et « Tranquillité ». Cela montre que le télétravail est apprécié non pas parce qu’il augmente le bien-être ou l’efficacité au travail — d’ailleurs assez peu évoquée dans les études —, mais parce qu’il permet une meilleure gestion du temps, davantage de conciliation entre vie professionnelle et vie privée. Pourtant, n’oublions pas que de nombreux moyens de contrôle à distance ont été mis en place par les employeurs, certains n’hésitant pas à charger leurs employés plus que d’habitude par peur qu’ils travaillent moins. À l’inverse, le travail sur site est valorisé pour les relations sociales qu’il permet. Pour que ces deux aspects soient conciliables, il faut une coordination du travail hybride à l’échelle des organisations qui le pratiquent pour ne pas être dans une situation où les personnes venant sur place pour trouver un contact humain se retrouvent devant des bureaux vides. On pourrait envisager, comme cela se fait déjà dans certaines entreprises ou administrations nationales, d’imposer un ou deux jours fixes de présence obligatoire. Malheureusement ce type de solution, est rendu impossible à la Commission européenne à cause de la politique restrictive de gestion des bâtiments. La réduction drastique du nombre de places au sein des bureaux ne permettra qu’à 50-60 % du personnel d’être présent sut site simultanément. Par ailleurs, rappelons aussi que l’essence des contacts humains ne se retrouve pas que dans l’accomplissement des tâches liées au travail, dans les réunions ou même dans des évènements ponctuels, mais aussi dans ce qu’il y a autour de cela, ce qu’on pourrait nommer la socialisation des couloirs. Ce sont aussi ces interactions légères, courtes et imprévues que l’on recherche en venant au travail.


[1] Pour cela nous nous appuierons principalement sur un article paru dans le média AOC sous la plume de Claudia Senik, professeure d’économie à Sorbonne Université (ex-Paris IV et Paris VI) : Senik, C. « Télétravail et bien-être : épilogue ou travaux en cous ? », AOC, 11 septmbre 2023, [En ligne], URL : https://aoc.media/analyse/2023/09/10/teletravail-et-bien-etre-epilogue-ou-travaux-en-cours/.

[2] Aksoy C., Barrero J-M., Bloom N., Davis S., Dolls M., and Zarate P. (2023). Working from Home around the World. 2023 Report. CESifo EconPol Policy Brief 7(53).

[3] Mas A. and Pallais A. (2017). Valuing Alternative Work Arrangements. American Economic Review 107 (12): 3722‑59.

[4] Les préférences des travailleurs à ce sujet ont similaires en Chine, cf. : He H., Neumark D., and Weng Q. (2021). Do Workers Value Flexible Jobs? A Field Experiment. Journal of Labor Economics 39 (3): 709‑38.

[5] Pabilonia S. and Vernon V. (2022). Telework, Wages, and Time Use in the United States. Review of Economics of the Household 20 (3): 687‑734.

[6] Gueguen C. and C. Senik (2023). Adopting telework: The causal impact of working from home on subjective well-being. British Journal of Industrial Relations: 1–37.

[7] Senik C., Clark A. E., D’Ambrosio C., Lepinteur A. and Schröder C. (2022). Teleworking and Life Satisfaction during COVID-19: The Importance of Family Structure. IZA Discussion Paper, 15715.

[8] Op. cit. Gueguen C. and C. Senik (2023).

[9] Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes). COVID-19 and Ending Violence Against Women and Girls, https://www.unwomen.org/-/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2020/issue-brief-covid-19-and-ending-violence-against-women-and-girls-en.pdf?la=en&vs=5006.

[10] Service Statistique Ministériel de la Sécurité Intérieure. Analyse conjoncturelle des crimes et délits enregistrés par la police et la gendarmerie à la fin du mois de juin 2020. Interstats Conjonct N° 58.

[11] Op. cit. Aksoy C., Barrero J-M., Bloom N., Davis S., Dolls M., and Zarate P


Comité Travail Hybride: l’exercice d’évaluation a enfin été lancé, mais par la DG HR !

Après de longs mois de discussions au sein du Comité Paritaire sur le Travail Hybride (CPTH) sur les règles de procédure, puis sur les lignes directrices qui ont été remplacées par un court document et des questions-réponses, on entre enfin dans le vif du sujet, peut-être trop tard compte tenu du fait que la révision de la mise en œuvre de la décision relative au travail hybride aura lieu au dernier trimestre de cette année.

L’exercice d’évaluation a été récemment lancé également par la DG HR afin de recueillir des données sur la mise en œuvre de la décision de la Commission sur le temps de travail et le travail hybride et proposer le cas échéant des recommandations d’ici septembre 2023 en vue d’une éventuelle révision de la décision. La DG HR a proposé une série de focus groups de 15 membres maximum (correspondants RH, chefs d’unité, directeurs généraux, etc…) qui seront consultés sur trois questions générales pour guider cet exercice. En substance, il est demandé à ces groupes d’évaluer (1) si la mise en œuvre a bien fonctionné ; (2) si des améliorations sont nécessaires ; (3) et quels sont les scénarios possibles pour l’avenir. Les résultats de l’enquête ainsi que des données disponibles sur la présence au bureau ainsi que sur l’utilisation des dix jours de télétravail en dehors du lieu d’affectation seront intégrés dans le rapport d’évaluation. Il serait souhaitable que ce rapport soit soumis pour avis à la représentation du personnel avant sa publication.

U4U a fait des propositions pour organiser des groupes de travail dans le cadre du CPTH. Lors de sa dernière réunion fin mai, celui-ci a décidé de mettre en place un groupe de travail sur la collecte des données et les indicateurs. Entretemps, le Comité Central du Personnel (CCP) a été saisi dans le cadre de la consultation organisée par la DG HR avec un délai de 15 jours ouvrables pour fournir des observations. 

Il est important que le CPTH, et surtout la représentation du personnel, soit pleinement impliqué dans cet exercice afin qu’il joue pleinement le rôle pour lequel il a été mis en place. Autrement, on court le risque d’avoir eu un comité paritaire inutile, alors qu’il devait alimenter la réflexion de la représentation du personnel pour lui permettre de contribuer activement au dialogue social sur un sujet si important pour l’avenir de la fonction publique européenne.


Travail hybride : quels enjeux pour le suivi ?

Suite à la décision de la Commission sur le temps de travail et du travail hybride, sur base d’une proposition faite par U4U, un comité paritaire composé de membres des OSP et de la DG HR a été mis en place pour une période de 18 mois pour en assurer le suivi et émettre des avis sur des questions pertinentes. Une évaluation de la mise en œuvre de la Décision est prévue en septembre 2023 en vue d’une éventuelle révision.En décembre 2022, le comité a adopté les règles de procédure qui lui permettent de fonctionner pour remplir son mandat. Entre temps, la DG a présenté ses lignes directrices sur la mise en œuvre de la décision et consulté les autres comités paritaires qui ont présenté leurs propres avis.Les lignes directrices ont fait l’objet d’un débat intense au sein du comité paritaire sur le travail hybride sans arriver toutefois à un accord entre ses membres. Tout en reconnaissant l’utilité de ce document qui permet de clarifier certaines dispositions juridiques avec des exemples concrets, il n’en demeure pas moins que cette guidance ne doit pas aller au-delà de ce qui est prévu dans la décision. Son objectif est double : d’une part aider à une mise en œuvre de la décision de la Commission et d’autre part faciliter un suivi efficace, efficient et cohérent de cette décision sur la base de l’expérience vécue et des problèmes rencontrés.Plusieurs questions ont été soulevées au sein du comité, notamment sur l’organisation de la journée de travail de 8h, la nécessité pour le personnel d’être joignable en dehors de heures de travail en cas de besoin, le droit à la déconnexion, les arrangements internes sur le télétravail (et les dérogations possibles), et le télétravail en dehors du lieu d’affectation. Toutefois, il nous semble que certaines questions importantes n’ont pas fait l’objet d’un traitement spécifique, comme par exemple, les risques liés à la santé et à la sécurité – pour lesquels la DG HR renvoie à d’autres dispositions et documents de guidance. Au-delà de ces questions spécifiques, l’organisation et la structure du travail hybride reposent enfin de compte sur la confiance, la flexibilité et l’éthique de la responsabilité.Étant donné le rôle important de ce comité sur la mise en œuvre de la décision, il est nécessaire que le comité paritaire se saisisse des questions importantes pour le personnel et qu’il le fasse en adoptant une démarche empirique fondé sur des données expérimentales et des conclusions des travaux de recherche, à l’instar de ceux menés par Eurofound. Le rôle des experts est essentiel pour nourrir la réflexion et le travail du Comité.Il ne s’agit aucunement de diminuer le rôle des autres comités qui peuvent soulever des questions légitimes dans le cadre de leurs compétences (comme le COPEC qui peut à juste titre évoquer des risques potentiels de discrimination en termes d’égalité et de réconciliation entre travail et vie privée). Mais il ne faut pas perdre de vue la cohérence d’ensemble du dispositif lié au nouvel environnement de travail hybride dont les enjeux sont complexes et qui appellent donc une démarche d’action appropriée.24/01/2023

Rapport EUROFOUND sur l’essor du télétravail : diapositives (Jan 2023)

Télétravail : les enjeux du suivi des dispositions d’exécution établies suite au dialogue social avec les syndicats

Le télétravail est un enjeu important pour l’avenir de la fonction publique européenne. Les règles adoptées en matière de temps de travail et de temps hybride, font l’objet d’un encadrement et d’un suivi paritaire rigoureux. Le télétravail est un enjeu important pour l’avenir de la fonction publique européenne. Il pose une série de questions sur l’exercice du métier, sur les opportunités et les contraintes, les droits et les obligations, les implications liées à la nature du travail et les risques psycho-cognitifs potentiels. C’est aussi un équilibre délicat entre le souci d’assurer le bien-être au travail, une efficience accrue et l’intérêt du service.Les règles adoptées par la Commission le 24 mars 2022 en matière de temps de travail et de temps hybride1, doivent faire l’objet d’un encadrement et d’un suivi rigoureux , en concertation étroite avec les organisations représentatives du personnel. Il a été prévu à cet effet de constituer un comité paritaire pendant un an et demi pour assurer le suivi de la mise en œuvre de la décision de la Commission.Ce comité est présidé par un fonctionnaire (grade directeur) nommé par la DG HR et composé paritairement de quatre membres désignés par la DG HR et quatre membres désignés par le Comité Central du Personnel. Il doit en particulier adopter ses propres règles de procédures et décider sur ses propres méthodes de travail. IL pourra également mettre en place des groupes de travail conjoints pour mener des travaux préparatoires.La première réunion du comité s’est tenue le 11 juillet 2022 a permis de partager les expériences des différents participants et les spécificités liées à certaines directions générales ayant du personnel basé à Bruxelles et au Luxembourg ou les délégations, à certaines fonctions (par exemple les inspecteurs nucléaires) et à certaines catégories (notamment les agences exécutives ayant une majorité d’agents contractuels). D’autre part, la discussion a mis en lumière des divergences de vue au sein du groupe, notamment concernant des interprétations différentes de la décision, notamment sur le télétravail en dehors du lieu d’emploi. Des règles de procédure devront également être définies afin d’assurer le fonctionnement du groupe.Il est important que les membres du groupe – dont on peut regretter la mise en place tardive- adoptent une approche collégiale et unitaire dans l’intérêt du personnel.Le groupe devra également se pencher sur la question de l’équilibre entre ce qui a été établi dans la décision, à savoir la discrétion laissée aux directeurs généraux et chefs de service dans son application et la nécessité de garantir un traitement équitable, juste et transparent pour tous.Il faudra également accorder une place particulière aux questions de santé et de sécurité dont on sait qu’elles sont cruciales pour de nombreux collègues souvent soumis à une surcharge de travail ayant des effets sur leur bien-être individuel et familial.Enfin, l’efficacité du comité dépend dans une grande mesure de la nécessité de disposer de données objectives sur la diversité de pratiques existantes au sein de la Commission à travers des enquêtes ciblées auprès d’un échantillon représentatif à des fins de suivi et d’évaluation. Les groupes de travail pourront fournir une aide précieuse grâce au soutien actif d’experts qui pourront donner leur avis sur les questions plus pertinentes.Il s’agit là d’un vaste chantier auquel nous apporterons, sur base des travaux de ce Comité paritaire, notre contribution et un soutien constructif dans l’intérêt de tous.

1 Commission decision on working time and hybrid working, C(2022) 1788 final

Nos thèses sur le télétravail

Thèses sur le télétravail dans les Institutions européennes

Pour le débat

Définition : « Télétravail : Activité professionnelle exercée à distance de l’employeur grâce à l’utilisation de la télématique ». Par extension, activité professionnelle qui s’abstrait d’un lieu de travail particulier, défini.

Le télétravail ne se réduit pas au travail à domicile. Le télétravail peut se faire à domicile, dans des bureaux décentralisés, dans les bureaux centraux, pouvant être à la fois individuels, collectifs et collaboratifs, ou de passage (pour les visiteurs), ou encore à l’étranger (de manière limitée, par ex. 3 semaines/an).

Préambule: L’objectif du télétravail ne devrait pas être en priorité l’économie des moyens budgétaires, même si elle pourrait en résulter a posteriori ; ça devrait plutôt être de permettre au personnel de mieux accomplir ses missions et de mieux concilier vie privée et vie professionnelle.

Le télétravail est également mis en œuvre dans l’intérêt du service, pour améliorer l’efficacité du travail. Cette mise en œuvre ne devrait pas affaiblir la cohésion nécessaire au sein de la fonction publique européenne, ni mettre en péril l’accueil, l’intégration et les apprentissages.

Pour U4U, le télétravail est :

Volontaire / Réversible / Variable / Encadré / Flexible / Accompagné / Maîtrisé / Négocié

1. Volontaire : Point essentiel de tous les accords entre partenaires sociaux au niveau européen et dans les États Membres. Ni obligation, ni contrainte (sauf raison impérieuse, telle une pandémie).

2. Réversible : Corollaire du caractère volontaire. On peut choisir de revenir au présentiel.

3. Variable : Plus généralement, le télétravail peut être choisi de manière variable : une semaine et pas l’autre, le matin ou l’après-midi…

4. Encadré : Semaine de 40 heures, « coretime », plages horaires de 7h à 19h, travail de nuit exclu (art. 56 du Statut) ; attention particulière à la porosité entre vie privée et professionnelle, à l’hyper connectivité, aux risques de « surcharge digitale ».

Note: Dispositions à mettre en place pour permettre le télétravail à l’étranger pendant des périodes plus longues en cas de circonstances personnelles exceptionnelles.

5. Flexible : Mise en œuvre flexible: besoins différenciés, identifiés au sein des secteurs/unités pour répondre à la réalité des métiers, des sites, des projets, des équipes, d’échéances ou de situations de crise.

6. Accompagné : Les conditions de travail des fonctionnaires respectent les normes de santé et de sécurité (article 1 sexies par. 2 du Statut). Garantir un lieu spécifique au travail à la maison (ergonomie, éclairage, mobilier, etc.). Veiller à la prise en charge du coût engendré pour le travailleur.

Attention : Garantir une offre suffisante de services sociaux comme les crèches et garderies, ou la restauration collective (équilibre vie professionnelle – vie privée, santé mentale, efficacité du travail, cohésion, convivialité…)
Former à de nouveaux modes d’animation des collectifs de travail et de leadership, pour s’adapter à une pratique plus autonome et plus flexible du travail, qui se gère par objectif.

7. Maîtrisé : comme toute organisation du travail, le télétravail présente certains risques, qu’il faut reconnaître pour mieux les maîtriser et/ou les accompagner:

a. sur un plan technique :

Étudier l’émergence d’une nouvelle culture de la relation au travail dans un continuum d’hyper connectivité. Évaluer ses effets pour corriger les éventuels impacts négatifs (atomisation des collectifs, surmenage, isolement, etc.). Préparer et accompagner la mise en œuvre par des formations nouvelles du personnel et de l’encadrement, y inclus des formations pour éviter la « surcharge digitale ».

b. sur un plan personnel :

Attention particulière à la porosité entre vie privée et vie professionnelle. La conciliation entre les deux dépend aussi de :

(i) la mise en place ou le maintien de services aux collègues qui répondent aux besoins et
(ii) la promotion de rythmes de travail réguliers, respectueux du bien-être.

Assurer la flexibilité du lieu de travail. Un télétravail restreint au domicile entrave des besoins essentiels au développement de l’être humain, voire se traduit par des conditions de travail (et de vie) dégradées.

c. sur un plan organisationnel :

Comprendre l’importance fondamentale d’un travail en présentiel significatif pour assurer la formation et la cohésion des équipes de travail multiculturelles et pluridisciplinaires de la fonction publique européenne.

Éviter le recul de l’apprentissage qui s’opère simplement en regardant autrui faire. Prévenir le retard ou même l’échec dans l’intégration des nouveaux venus.

d. au niveau de la motivation :

Assurer que le télétravail ne soit pas une forme de fuite, qui mènerait à l’isolement, à une perte de vue de la finalité des tâches confiées. Le travail défini par d’autres devient plus formel encore quand on n’a pas d’autre contact que son écran. C’est seulement en intégrant l’individu dans un contexte de travail collectif qu’on peut lui donner l’opportunité de s’épanouir.

8. Négocié : avec les partenaires sociaux, représentants du personnel, et avec le personnel lui-même.

Apprendre de l’expérience acquise. Le télétravail offre une option riche de potentiels pour l’avenir. Pour réussir sa mise en œuvre, la raison commande de l’envisager sur la base d’une évaluation objective des effets observés tout en laissant le temps nécessaire à la réflexion. Sa pleine réussite dépend de la capacité et de la volonté des Institutions de gagner l’adhésion de tous.

Contexte et enjeux

La mise en œuvre du télétravail doit résulter du dialogue social entre partenaires sociaux : ce dialogue doit concerner d’abord ce thème, et aborder ensuite ceux qui lui sont corrélés : la politique immobilière, l’offre de restauration sur le lieu de travail, les systèmes de crèches et garderies pour les enfants, la mobilité de et vers les différents lieux de travail, les compensations financières des frais dus au télétravail, le respect de la santé et du bien-être sur tous les lieux de travail, etc.

Ce dialogue doit être précédé par une discussion basée sur une information complète. Il faut éviter à ce stade les méthodes consultatives sans débat ni information préalables.

Il est important de comprendre d’emblée l’importance d’un travail en présentiel significatif pour assurer l’intégration, la formation et la cohésion des équipes de travail multiculturelles et pluridisciplinaires de la fonction publique européenne.

En effet, la mise en œuvre du télétravail dans le contexte européen doit tenir compte de la diversité culturelle et linguistique. Elle ne doit pas entraver la formation des équipes de travail, de relations professionnelles « maison » nécessaires au traitement des dossiers, ni exclure un lieu de travail commun, unifié, au minimum par équipe. Elle doit au contraire le permettre et le favoriser en organisant régulièrement des opportunités de travail en présentiel.

L’enjeu est également d’éviter le recul de l’apprentissage qui s’opère simplement en regardant faire les autres. Il est tout aussi important de prévenir le retard ou même l’échec dans l’intégration des nouveaux venus.

Tous ceux qui travaillent au sein du service public européen doivent pouvoir continuer à porter le projet européen et à assurer des politiques publiques de qualité. Il est difficile d’être ensemble, engagés ensemble, quand on travaille entre deux modes imposés : l’inconfort d’un hotdesking mal préparé et le confort d’un « home office » isolé du monde et de sa diversité.

Si le télétravail offre une option riche de potentiels pour l’avenir, la raison commande de l’envisager sur la base d’une évaluation objective des effets observés suivie du temps nécessaire à la réflexion. Sa pleine réussite dépend de la capacité et de la volonté de l’institution de gagner l’adhésion de tous. Aussi enthousiaste puisse-t-on être, on ne peut ignorer les souffrances de ceux qui ne s’expriment pas – dans les « pulse surveys » par exemple -, ou sont sortis de nos radars pour cause de dépression et/ou d’incapacité à s’adapter aux nouveaux environnements de travail.

Car l’observation des réactions au télétravail révèle un tableau nuancé et complexe où l’autonomie le dispute au mal être. Le télétravail ne peut être une solution miracle. Mal accompagné, il peut même favoriser le sentiment d’isolement, d’atomisation et de perte du lien social, voire d’impossibilité de créer ces liens. Et tout ceci aura inévitablement un effet sur la qualité de nos résultats, individuels autant que collectifs.

Le télétravail ne vise pas en priorité l’économie des moyens budgétaires, même si elle pourrait en résulter a posteriori. Il vise plutôt à permettre au personnel de mieux accomplir ses missions et, si possible, de mieux concilier vie privée et vie professionnelle. La réalisation d’économies doit résulter d’une discussion spécifique à ce sujet, comme demandé par la représentation du personnel.

Pour nous, la politique immobilière est une conséquence de la mise en œuvre du télétravail et non pas l’inverse. Pour nous encore, le télétravail est volontaire, réversible, variable, sa mise en œuvre devant être flexible et décidée à un niveau décentralisé. Par conséquent, nous pensons que le choix du lieu où le travail s’effectue doit permettre de combiner les endroits : à domicile, dans des bureaux décentralisés, dans les bureaux centraux, pouvant être à la fois individuels, collectifs et collaboratifs, ou de passage. Il devrait être aussi possible, à l’intérieur d’une même équipe, de fonctionner de manière hybride : certains à domicile, d’autres en mission sur d’autres lieux de travail, d’autres encore dans les bureaux centraux.

Bref, l’intégration du télétravail dans nos pratiques reste à inventer, sans a priori. L’établissement d’une nouvelle culture de travail demande de prendre en compte différentes dimensions: organisation spatiale, mais également temporelle, managériale, relationnelle… C’est le but des thèses ci-dessus qui visent à réagir et à penser sa généralisation dans le contexte de la fonction publique européenne et de sa population spécifique de personnel expatrié.

June 2021

Congés spéciaux, à l’occasion de l’arrivée d’un enfant

Evolution des congés spéciaux, à l’occasion de l’arrivée d’un enfant: un progrès intéressantA l’origine, le statut a reconnu des droits aux familles: pension de veuve/veuf, pension d’orphelin, allocation familiales etc. Il couvre également la famille de l’affilié qui bénéficie, par exemple, du régime d’assurance maladie (sous certaines conditions pour le conjoint en activité).A l’occasion des différentes réformes, le législateur de l’Union a fait évoluer les droits des agents, notamment avec la reconnaissance des partenariats, sous certains conditions, y compris pour les personnes de même sexe. Il a également reconnu de nouveaux droits et/ou principes, à l’instar de la non-discrimination (art 1er quinquies du statut) ou de la garantie de l’accès aux mesures sociales (art. 1er sexies du statut)Ces évolutions de notre statut démontrent que le législateur de l’Union et la Commission, sont attentifs aux changements sociétaux qui se produisent dans les Etats membres et qu’ils peuvent en tenir compte, même si c’est parfois de manière tardive.La Commission propose aujourd’hui d’adopter une nouvelle décision relative aux congés spéciaux et aux congés maternité en cas d’adoption, afin qu’un des parents, au moins, puisse s’occuper pleinement de l’enfant.Aujourd’hui, le statut prévoit déjà la possibilité d’accorder un congé spécial ad hoc pour prendre en compte certaines situations spécifiques. Ainsi, l’AIPN a accordé des congés spéciaux, en cas d’adoption, afin de garantir l’intérêt supérieur de l’enfant et d’assurer une interprétation inclusive des dispositions statutaires.La décision en projet prévoit que lors de l’arrivée d’un enfant au sein de son foyer, un congé spécial équivalent au congé spécial pour adoption est accordé au membre du personnel lorsque ni lui, ni son conjoint ne remplissent les conditions pour bénéficier d’un congé de maternité.U4U considère que cette décision va dans le bon sens et participe de l’adaptation des règles à la société moderne. Nous ne pouvons qu’encourager la Commission à poursuivre dans cette voie !

Le télétravail et nous

(éditorial du bulletin du Comité du Personnel à Bruxelles – Dec 2020)  EN version herebelow

Le télétravail faisait déjà partie de notre environnement de travail avant la pandémie de mars 2020. Mais il le faisait de manière limitée, sinon marginale, tant pour le télétravail structurel qu’occasionnel.

La pandémie a poussé notre institution à une marche en avant forcée tendant vers une généralisation du télétravail, afin de préserver le personnel de ses effets négatifs.

Cette généralisation a soulevé tout d’abord un premier défi, celui de nos capacités techniques. Pouvait-on connecter et faire travailler plus de 30.000 collègues à distance en même temps? La réponse fut positive. Dans un second temps, s’est posé la question du coût à supporter par le personnel, puis les questions liées à la bureautique, ou encore à la possibilité de travailler de son lieu d’origine.

Petit à petit, la satisfaction du personnel de travailler dans un environnement sûr s’est transformé, l’inquiétude prenant le pas sur la sérénité. La deuxième vague de confinement montre que l’isolement social induit devient de plus en plus difficile à supporter. Des questions qualitatives prennent le pas sur les questions matérielles. Beaucoup de collègues constatent l’accélération des rythmes de travail et subissent la porosité de plus en plus forte entre les vies privées et professionnelles avec une difficulté croissante à maintenir des équilibres. Les difficultés inhérentes à la vie des familles, surtout celles monoparentales et expatriées, se sont de fait exacerbées. L’intégration des nouveaux venus recrutés début 2020 dans les services s’est avérée une faillite pour beaucoup d’entre eux. Et nos managers ne sont pas formés à l’animation des collectifs à distance. Certains ont même été perdus de vue….

Une nouvelle réalité se dessine : les facilités accordées par l’administration en terme d’acquisition de matériel bureautique risque de donner lieu à des moins disant au niveau des bureaux, des lieux de travail et des espaces en général quand il s’agira de retourner au travail.

L’impression prévaut que le télétravail va devenir en partie obligatoire pour permettre la mise en place d’espaces collaboratifs, voire « d’open space », pire, de « hot desk ». Si cela se discute, force est de constater qu’aucun dialogue avec la représentation du personnel n’a encore eu lieu sur les conséquences de cette généralisation. Un dialogue fondé sur une information critique et complète des expériences du télétravail dans nos services, et dans d’autres services et organismes est pourtant essentiel.

Car sait-on vraiment télé travailler ? Il a fallu acquérir vite une maîtrise relative de la dimension technique du télétravail. Mais la découverte majeure fut celle d’une méconnaissance générale des modes de travail à adopter. Si dans une certaine mesure le télétravail a constitué un progrès, dans une autre mesure il a favorisé l’atomisation de la fonction publique, il a envahi la sphère privée avec les activités professionnelles, et réciproquement, il n’a pas favorisé un accueil correct des nouveaux collègues ni les liens avec nos interlocuteurs extérieurs, il a mis à mal notre bien-être et notre santé. À première vue, les effets négatifs proviendraient de la généralisation du télétravail structurel qui isole tandis que le télétravail occasionnel, même plus massif, peut d’avantage découler des choix organisationnels d’équipe.

Le télétravail nous a apporté beaucoup : d’abord accomplir notre mission en période de pandémie dans un contexte délicat de crise et de discussion budgétaires, où la société européenne avait besoin de sa fonction publique. Mais tout en nous permettant de garantir la continuité du service, le télétravail généralisé nous a éloigné les uns des autres, au risque de mettre en danger le collectif de travail, l’esprit de corps, la convivialité indispensable à toute organisation humaine et notre bien-être physique et mental.

Ces réflexions constituent des questions à aborder au sein du personnel. Nous devons nous forger notre propre opinion sur la manière de travailler la plus efficace et la meilleure pour nous. C’est le défi du début de l’année 2021.

Georges Vlandas
Président du Comité du personnel de la Commission à Bruxelles

Note du CCP concernant la protection des données personnelles des employés des institutions par Microsoft (Jan 2021)

La CESI signe l’accord des partenaires sociaux de l’UE sur la numérisation des administrations centrales

U4U est membre de la CESI. Nous sommes fiers de vous informer que le 6 octobre, la CESI, en tant que partenaire social européen pour les administrations centrales, a signé un accord historique sur la numérisation, visant à couvrir tous les travailleurs de ce secteur.

L’accord européen signé sur la numérisation est un tremplin vers les droits des travailleurs au télétravail, à la déconnexion, à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, à la formation, à la santé et à la sécurité, à la protection des données ou contre l’utilisation abusive de l’intelligence artificielle.

De manière innovante et ambitieuse, le nouvel accord établit la nature volontaire, réversible et disponible du télétravail pour chaque travailleur. La décision d’accorder le télétravail doit être basée sur une analyse conjointe avec les syndicats des tâches et des activités, et le soutien et l’équipement nécessaires pour travailler à domicile doivent être mis à disposition, avec une compensation suffisante pour les dépenses supplémentaires qui pourraient survenir.

L’accord peut, à la suite d’une décision de la Commission européenne et du Conseil, devenir une directive juridiquement contraignante. Son contenu reste une source d’inspiration pour d’autres secteurs et niveaux et reflète l’ambition de l’UE d’adapter sa main-d’œuvre à l’avenir.

Les partenaires sociaux intersectoriels ont récemment entamé leur propre négociation de l’accord-cadre de 2002 sur le télétravail et nous espérons que cet accord sur la numérisation sera une bonne source d’information et d’inspiration pour eux.

Le communiqué de presse relatif à la signature officielle avec les interventions de Klaus Heeger, Secrétaire général de la CESI, est disponible ici.

Décision de la Commission sur le temps de travail et le travail hybride

Décision prise par la Commission en 2022

La COVID19 a généralisé le télétravail

La pandémie actuelle nous a permis de pratiquer le télétravail à une plus grande échelle avec des avantages certains, comme par exemple, travailler plus facilement et régulièrement avec des collègues situés sur d’autres sites, travailler dans des conditions sanitaires plus sûres en période d’épidémie, assurer un meilleur équilibre entre vie familiale et vie professionnelle, réduire la charge et la pénibilité d’une mobilité quotidienne via les transports publics ou privés, etc. Mais le télétravail soulève aussi des problèmes.

En effet, la généralisation et la pérennisation du télétravail poseront des problèmes que l’on ne soupçonne pas encore et dont on devra débattre en termes de cohésion des équipes de travail, d’accueil des nouveaux collègues, de risques psycho-sociaux, de problèmes bureautiques, de difficultés d’une communication collaborative, de maintien d’une nécessaire rupture entre le professionnel et le privé.

Avec la généralisation du télétravail, on a une présence excessive de la sphère professionnelle dans la sphère personnelle (et réciproquement) en même temps que l’on perd la dimension interpersonnelle dans le travail. Il faut aussi souligner la présence d’inégalités entre les membres du personnel selon la possession ou pas d’un habitat suffisamment grand et de condition de travail adéquates, la présence permanente d’enfants, la situation du conjoint (quand deux télé travaillent ou quand seul celui ou celle qui télé travaille assume les enfants), etc.

Dans une large mesure, certaines de ces difficultés peuvent être résolues par l’adaptation des outils et environnement aux réalités de travail dans les institutions. Toutefois, ceci doit être convenablement discuté.

Nous préconisons des évolutions progressives respectueuses du temps nécessaire à l’adaptation, fondées sur une réflexion de fond, conduite sur base d’expertises indépendantes et une discussion interne à la fonction publique européenne. Cette réflexion devra s’opérer en dehors du contexte épidémique actuel qui ne permet pas suffisamment des mises en perspectives sereines.

18/10/2020

Télétravail : un document pour le dialogue social   Lettre à la DG HR sur le télétravail (Nov 2015)